Après « le politique au cinéma » en octobre 2017, l’association Sentiers-Massarib, en partenariat avec le ciné-club de Menzel Bourguiba, Archipels Images, l’Association pour l’Edification d’une Culture de la Citoyenneté et Echos cinématographiques, a organisé une deuxième manifestation à Menzel du 25 au 29 décembre 2018. Soutenue par la fondation Rambourg, la maison des jeunes de Tinja, la fondation euro-méditerranéenne de soutien aux défenseurs des droits de l’Homme et la maison de la culture Bayrem Ettounsi à Menzel Bourguiba, cette manifestation consacrée au « Jeune cinéma tunisien et algérien » est constituée de projections et d’ateliers de réalisation et d’analyse filmique.
Le choix du thème « Jeune cinéma tunisien et algérien » émane d’une conviction et d’un constat de renouvellement du cinéma dans les deux pays, d’une volonté de s’arrêter sur les manifestations de ce renouvellement à travers un choix de films réalisés par de jeunes cinéastes aux parcours différents et de la nécessité de faire résonner entre elles les expériences algériennes et tunisiennes d’autant plus
Parmi les films algériens, nous avons retenu des propositions fortes aussi bien dans le documentaire que dans la fiction : le mode narratif tripartite doublement construit sur la continuité et la discontinuité au service de la représentation de ce qui bloque et d’un passé qui ne passe pas dans En attendant les hirondelles de Karim Moussaoui ; la mémoire dévastée d’un lieu et de ceux qui l’habitent, jeunes et moins jeunes, explorée par une démarche documentaire tout aussi vigilante qu’attentive au sensible et aux traces du désastre dans Atlal de Djamel Kerkar. Les films tunisiens qu’on a choisis appartiennent au cinéma indépendant et ils ont été très peu vus en Tunisie (Forgotten n’a été montré que dans des manifestations cinématographiques associatives, il a été boudé par les JCC en 2017 et Dans la peau a été projeté une seule fois à la cinémathèque tunisienne). Les deux films s’inscrivent dans un renouveau qui travaille aussi bien le documentaire que la fiction. Forgotten de Ridha Tlili est dédié à une réflexion sur l’invisibilité de certains jeunes, de certains territoires et sur leur exclusion du champ de la représentation. Quant à Dans la peau de Jilani Saadi, qui n’est pas aussi jeune que les autres cinéastes auxquels on a pensé, il a ouvert la voie à une expérimentation qui s’affirmera davantage dans les films suivants du cinéaste : Bidoun 1, 2 et 3. En gros, pour ce qui est du cinéma tunisien, nous avons préféré programmer des films qui souffrent des contraintes du marché plutôt que des films qui sont certes intéressants mais qui ont eu l’opportunité d’intégrer le circuit commercial. Les courts métrages choisis répondent à peu près aux mêmes critères : deux catégories de courts sont proposés dans la programmation, ceux qui ont été réalisés par des cinéastes qui sont aussi auteurs longs métrages (Les Baies d’Alger et Tarzan, Don Quichotte et nous de Hassen Ferhani) et ceux qui ont été réalisés par de jeunes cinéastes qui ne sont pas encore passés à l’étape du long métrage (Fade de Alaeddine Abou Taleb et Interdit d’aimer de Marwa Tiba).
Les trois ateliers au programme étaient destinés à trois tranches d’âge : un atelier de réalisation pour enfants à l’école primaire El-Blat animé par Intissar Belaïd, Chaïma Chorfane et Anissa Troudi ; un atelier d’analyse filmique au collège Ibn Charaf modéré par Tahar Chikhaoui et Insaf Machta, où nous avons accueilli aussi Majd Mastoura pour parler de la direction d’acteur, et un atelier de réalisation pour jeunes adultes animé par Nina Khada et Soumaya Bouallagui à la maison de jeunes de Tinja et où les participants venaient de Tinja, Menzel Bourguiba, Tunis et Redeyef. Ces ateliers témoignent du souci de joindre deux dimensions qui se travaillent l’une l’autre dans toutes les manifestations que nous organisons : la réflexion sur l’image et l’initiation d’un public jeune à sa fabrication.
La manifestation a été clôturée par la projection de Dans la peau de Jilani Saadi en sa présence, le débat a été animé par Tahar Chikhaoui et Majd Mastoura et par la projection du film tourné à l’école primaire (Haykel al hayet), film surprenant par la manière dont les enfants ont transformé un élément du décor en un personnage, et ceux réalisés dans le cadre de l’atelier de la maison des jeunes : l’un de ces films explore un lieu (le cimetière) et le deuxième consiste en un documentaire personnel autour de l’attachement de l’un des jeunes participants, à la fois auteur et personnage, à une figure paternelle : le vieux masseur qui travaille au hammam de son propre père.
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